Un excellent article du Monde du 02.10.2014 par Olivier Razemon.
Et vous, au travail, vous y allez comment ? Cette question est posée par l’Insee, de manière certes moins familière, lors des enquêtes annuelles de recensement de la population. Jusqu’à présent, les personnes recensées (environ 10 % des habitants chaque année, par roulement) avaient le choix entre cinq réponses, non cumulatives : « marche à pied », « deux-roues », « voiture, camion, fourgonnette », « transports en commun », ou encore l’option minimaliste « pas de transport ».
Lors de la prochaine enquête, qui débutera début 2015, il sera possible de cocher une nouvelle case sur le formulaire individuel orange et bistre distribué par l’Insee : « vélo ». Comme le précise une note interne, l’institut de statistiques « a décidé de prendre en compte l’introduction du vélo dans les modalités de transport ». Cette mesure faisait l’objet d’une forte demande de la part d’élus, de techniciens et de spécialistes de la statistique.
UNE CASE « VÉLO » SUR LE BULLETIN INDIVIDUEL DE RECENSEMENT
L’Insee, qui interroge les habitants sur leurs modes de déplacement depuis plusieurs décennies, plaçait jusqu’à présent les cyclistes dans la même catégorie que les adeptes de la moto ou du scooter. Or, ces moyens de locomotion ne présentent pas les mêmes caractéristiques.
On ne parcourt pas des distances équivalentes sur un vélo ou sur une moto, les infrastructures et la disposition du stationnement ne sont pas identiques, l’accidentologie non plus. En Ile-de-France, par exemple, les résultats publiés pour l’année 2009 montraient que 4,6 % des trajets se faisaient sur un « deux-roues ». Que pourrait-on déduire, par exemple, d’un doublement de cette proportion ? Qu’il faudrait davantage de pistes cyclables ou davantage de places de stationnement pour les scooters ? Des campagnes de prévention contre les accidents de moto ou des double sens cyclables ?
Interrogés début 2013 sur la possibilité d’insérer une case « vélo » sur le bulletin individuel de recensement, les responsables de l’Insee s’étaient montrés prudents. « Nous avons conçu les bulletins au début des années 2000. A l’époque, il n’avait pas été jugé nécessaire de distinguer les deux modes », expliquait alors François Clanché, chef du département de la démographie. « Il est prévu de faire évoluer le questionnaire », indiquait-il cependant, sans toutefois s’engager à le faire dans un délai précis.
LES CYCLISTES RÉGULIERS
L’institut se refusait par ailleurs à allonger démesurément le questionnaire remis aux personnes recensées. Plus la fiche à remplir est longue, plus les agents-enquêteurs risquent de se heurter à un refus.
Les premiers éléments de ce recensement affiné des trajets entre domicile et travail ne seront, en principe, connus que lorsqu’un roulement complet de cinq enquêtes aura été effectué, c’est-à-dire fin 2019. « A moins que l’on décide de publier certains résultats à l’avance », avance-t-on à l’Insee.
Les données, comme toutes celles qui émanent des recensements, seront publiques. Elles pourront être exploitées par les collectivités, mais aussi par les consultants ou les développeurs d’applications mobiles. On saura enfin avec précision dans quelle ville les cyclistes réguliers sont les plus nombreux, de quoi entretenir l’émulation entre Bordeaux, Strasbourg et Nantes, par exemple…
D’autres enquêtes pourraient s’inspirer de cette évolution de l’Insee. La SNCF continue de distribuer, dans les trains, des formulaires interrogeant les voyageurs sur la manière dont ils se sont rendus à la gare. Pas moins de huit réponses sont proposées, « TGV », « TER » « voiture en tant que conducteur » ou « voiture en tant que passager », mais les items « vélo » et « deux-roues motorisé » sont toujours rangés dans la même catégorie.
Olivier Razemon
Journaliste au Monde