La Loire expliquée… 2
Repris de la page Facebook « RDV au Parle-Loire »
Le lit majeur
La Loire et son lit … 2
Le lit majeur de la Loire est assez semblable à son lit mineur, façonné qu’il a été par des crues historiques et une période ancienne où la rivière s’entendait véritablement en largeur. Les grandes crues peuvent être estimées à des débits de 6 000 à 9 000 mètres cubes secondes pour une côte de 5 mètres et plus au dessus de l’étiage.
Quand la Loire submergeait les parties bombées du lit mineur constituées comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, elle formait alors une vaste étendue sur toute la largeur du Val. On note à certains endroits des largeurs de plus de 15 kilomètres. On observait alors des phénomènes avant l’élévation des levées, des phénomènes qui effrayaient la population et qui sont restés dans les esprits quand Loire et Loiret à Orléans, Cher et Loire à Tours signifiaient désastres et souffrances. Cette jonction d’un affluent et de la Loire est évoquée par Grégoire de Tours et les chroniqueurs suivants qui lui succèdent par la suite pour montrer l’ampleur de la crue.
Des travaux de rehaussement des digues ont été entrepris durant les règnes de Louis XIV et Louis XV. À partir de cette époque, la catastrophe ne venait plus de cette jonction mais de la rupture d’une levée. On trouve dans tout notre Val des lieux dits qui portent le nom de faille : Faille du moulin, Brèche aux loups , … qui relatent un franchissement très localisé de la rivière.
Sans le relèvement des digues, les côtes de plus de 7 mètres qui provoquèrent désastres et morts au XIX° siècle ne doivent cette mesure exceptionnelle que par le seul resserrement de la rivière dans son lit mineur. Sans ces murs de pierre, les côtes eurent été de moins de 5 mètres sans doute. Les ravages auraient été tout autre également.
Notons que les édifices anciens comme les églises, construits avant l’élévation des levées sont généralement sur des butes situées à une hauteur de 5 m 50 au-dessus de l’étiage, hauteur qui durant des siècles suffisait à préserver de la colère des eaux. On peut noter que les observations faites sur les dépôts de sable après les crues exceptionnelles attestent cette mesure. En effet quand les eaux se retirent, elles laissent des monticules de sable 80 centimètres sous le niveau de l’eau. Si on ajoute cette mesure à la plus haute hauteur de dépôt en situation ordinaire, sur les îles par exemple (cf chapitre 1) nous arrivons à cette hauteur de 5 m 50 qui sans les digues, assurerait une protection suffisante.
Tout ceci pour rappeler que l’économie ligérienne autrefois était semblable à celle du Nil. La Crue apportait des limons, les eaux se répandaient sans heurts sur le lit majeur sans provoquer de désastres. La volonté de protéger les biens provoqua des désastres humains tout en emprisonnant la Loire, qui par la faute des levées a perdu son caractère sauvage.
De ce passé lointain, il existe encore une dépression latérale, située à environ 2 mètres au-dessus de l’étiage ou jadis venaient s’engouffrer les eaux en furie. Ces dépressions sur le lit majeur sont des zones plus humides même en période de sécheresse. Cependant, les véritables zones humides ne se trouvaient qu’aux abords des confluences. On peut ainsi évoquer la construction de l’abbaye de Micy en 509 avec pour mission d’assainir le marais que constituait la jonction du Loiret et de la Loire.
Il existait alors sur le lit majeur des régions hautes entourées de dépressions. Lorsque la Loire s’étendait, l’hiver notamment, ces sites devenaient quelques temps des îles et se trouvaient coupés des villages voisins. On trouve encore l’appellation « île » qui peut surprendre comme pour l’Île Charlemagne à Orléans. Plus en amont, le village de Bou était alors une île, lui aussi.
Fort de ces remarques, on peut ainsi expliquer la présence d’anneaux d’amarrage ou de noms de rue évoquant les activités de marine, loin du lit mineur dans des villages qui autrefois, à certaines périodes, devenaient riverains de la Loire. On peut citer Mardié, Baule, Suèvres par exemple.
C’est ainsi que des fosses demeurent parfois à distance de la rivière, parfois derrière la levée. On les nomme selon les régions : gours, crots, canches : termes que l’on retrouve dans les toponymies. Sur le lit mineur le même phénomène se retrouve avec les boires et parfois vieilles Loires. Ces dépressions en eau parfois permettaient alors aux riverains de capturer des poissons en échappant à la loi royale qui accordait ce droit contre taxe.
À suivre …
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